Le facility management (FM) et ses métiers ont connu ces dernières années de profondes mutations. Entamés par l’externalisation des services généraux et sa logique de baisse des coûts, ces changements se sont poursuivis, avec l’arrivée du Covid, par la réappropriation des sujets « environnements de travail » par les grandes entreprises, poussées à mettre l’accent sur la sécurité des collaborateurs. L’espace de travail est alors devenu un lieu soumis à une planification rigoureuse, nécessitant une gestion précise et fiable par le biais d’outils digitaux. Cette révolution des usages menée par le télétravail, mais aussi plus récemment par les enjeux ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance), conduit aujourd’hui à examiner la destination des locaux d’entreprise selon un nouveau prisme, et à repenser la maintenance dans son ensemble.

Les enjeux ESG accélèrent la métamorphose du facility management

La GMAO se situe maintenant au centre du jeu, grâce à une production de données fiable, pérenne, riche, et alimentée par l’ensemble des parties prenantes, que sont les donneurs d’ordres, les prestataires de services, et les occupants.

L’environnement de travail, et par ricochet le facility management, sont désormais fortement influencés par les critères ESG et leur prise en compte dans la réglementation (décret BACS - Building Automation and Control System - entré en vigueur le 21 juillet 2021, directive CSRD - Corporate Sustainability Reporting Directive – entrée en vigueur le 1er janvier 2024, par exemple). L’immobilier est en effet la première source d’émissions de carbone dans les pays développés. Pour les organisations, la mise en place d’une stratégie net zéro carbone passe donc nécessairement par une attention particulière portée à leur parc immobilier : rationalisation de la consommation d’énergie et de fluides, mise en place de plans pluriannuels de travaux, choix des assets, etc. De son côté, le FM doit concourir étroitement à cette démarche durable, qui mobilise non seulement les occupants des bâtiments, mais aussi l’ensemble des ressources à disposition des entreprises, dont font partie les prestataires de services, et qui mettent en œuvre les plans de réduction des émissions de CO2. 

Girl working in green home office.

Aujourd’hui, l’impératif de prise en compte des critères ESG semble concentrer à lui seul l’ensemble des autres enjeux du facility management, que sont la réduction des coûts, la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT), la conformité, ou encore la création de valeur. Prenons l’exemple de la QVCT, qui n’est plus uniquement liée à la qualité des locaux et des services associés, mais tend désormais à se fondre dans l’image de l’entreprise, exemplaire ou non. On sait par ailleurs combien les nouvelles générations de travailleurs sont sensibles à la mobilisation véritable d’une organisation quant aux considérations environnementales, faisant même de celle-ci un critère majeur d’attractivité. De la même manière, l’enjeu de réduction des coûts surpasse dorénavant l’optimisation budgétaire brute et générale de l’entreprise pour se focaliser notamment sur la consommation d’énergie, et en faire un axe de progrès. Pour les grands groupes et leurs prestataires de services qui se sont lancés dans cette initiative, il s’agit en premier lieu de rationaliser l’usage des bâtiments afin de faire baisser les coûts de l’énergie. Ce dernier point ayant un impact direct sur le score CSRD de la société et sur sa valorisation boursière.  

À première vue, les critères environnementaux peuvent être perçus comme la réponse à une crise et ne représenter que des contraintes. Mais ils constituent en réalité une multitude d’opportunités pour l’ensemble des acteurs du secteur de l’immobilier, société civile comprise, qui bénéficie d’une qualité de vie améliorée grâce au télétravail. Une faculté de travail à distance qui permet également de résider plus loin de son site professionnel, et qui concourra peu à peu à la déconcentration de certaines zones géographiques, et par là-même, à la baisse des prix de l’immobilier. Les property managers, quant à eux, voient une segmentation s’opérer sur leur portefeuille immobilier, allant de pair avec la possibilité de réaliser sur celui-ci des opérations de valorisation, permettant à leur tour à leurs mandants de proposer une offre de services bonifiée. Enfin, pour les prestataires de services, ces « contraintes » ESG sont en réalité synonymes de nouvelles offres à haute valeur ajoutée, favorisant une approche conseil, et destinées à retenir davantage l’attention des directions générales.

La réinvention du marché du FM passe par l’utilisation de solutions digitales 

les données d’exploitation immobilière sont aujourd’hui devenues un asset de l’entreprise à part entière. 

Cette évolution récente du marché engendre un surcroît d’intérêt des parties prenantes sur l’état de santé des bâtiments, ou sur leur exploitation rationalisée. À ces éléments, viennent désormais s’ajouter la nécessité d’historiser les données et de se projeter dans le temps, les entreprises devant notamment assurer le suivi de leur plan de réduction d’émissions carbone. Ce changement de pratiques a conduit à une prise de conscience des organisations quant à l’impératif de se doter de solutions de pilotage de leurs actifs immobiliers, véritables socles d’informations qui rendent possibles la mise en place et le suivi de leurs plans d’action. Auparavant, les outils de GMAO étaient utilisés de manière purement opérationnelle et s’inscrivaient uniquement dans la durée de vie du contrat en cours avec le prestataire de services. Une approche qui n’a pas permis aux clients finaux de tirer profit des données générées pour améliorer durablement leurs process, la data n’étant pas systématiquement reprise lors de chaque renouvellement de contrat. Cette vision à court terme sur les données issues des bâtiments, et sur l’état de santé de ces derniers, est donc remplacée par une stratégie d’analyse et de suivi de la data à long terme permettant aux entreprises de réaliser un véritable pilotage de leurs actifs immobiliers. Grâce à ce changement de paradigme, les éditeurs de solutions FM ont pu renforcer et valoriser la dimension « référentiel technique immobilier » des informations intégrées et produites au sein de leur plateforme digitale. À tel point que les données d’exploitation immobilière sont aujourd’hui devenues un asset de l’entreprise à part entière. 

Maintenance engineer looking at a tablet.

La GMAO se situe maintenant au centre du jeu, grâce à une production de données fiable, pérenne, riche, et alimentée par l’ensemble des parties prenantes, que sont les donneurs d'ordre,les prestataires de services, et les occupants.

À la clé, un partage des responsabilités, mais aussi de nombreux bénéfices centralisés : fluidification de l’usage des bâtiments par le biais d’apps ou de portails afin d’effectuer des demandes de services, pilotage facilité de la maintenance, suivi des KPI et des SLA des contrats, ou encore respect de la conformité réglementaire eu égard à l’usage des bâtiments, tant sur le volet sécurité que sur l’aspect réduction des émissions de CO2. Les solutions FM se sont adaptées aux nouveaux besoins des entreprises et intègrent dorénavant les référentiels techniques existants provenant de la construction et de l’architecture (Maquette BIM), ainsi que des outils de mise en œuvre, de pilotage, et d’optimisation des plans stratégiques de réduction carbone.

Des évolutions techniques et logicielles qui viennent enrichir les couches métiers de ces solutions numériques, permettant aux prestataires de services de construire de nouvelles offres et de les suivre. 

La pérennité de la data du facility management, un atout concurrentiel pour les entreprises

La continuité d’utilisation des solutions digitales FM va progressivement devenir l’un des enjeux essentiels du marché. En effet, on commence déjà à entrevoir un changement d’appréciation autour de la notion de propriété de la donnée, et de propriété de la solution, la collaboration des différents acteurs au sein d’un même outil posant la question de l’appartenance de la data. Dans ce contexte, un glissement de la détention des outils, du prestataire vers le donneur d’ordres, va alors nécessairement s’opérer, le référentiel technique devenant un asset de l’entreprise. Les outils digitaux du facility management se transformeront alors en solutions pérennes et intègreront une donnée normalisée dans sa structure. 

Cette mutation structurelle du marché va nécessairement entraîner des évolutions techniques. Si des outils de BI facilitant la prise de décision sont déjà embarqués dans les solutions FM, l’implémentation prochaine de moteurs d’IA représentera un gain de performance et une plus-value financière supplémentaires pour les parties prenantes. Une IA générative qui permettra notamment d’optimiser les outils de gestion de contrôle des bâtiments (GTB) en allant capter l’information au plus près, et d’améliorer la conception de l’interface utilisateur (UI) des solutions FM, accessibles via tous devices : Smartphones, tablettes, et montres connectées. 

Les éditeurs de solutions digitales FM sont appelés à voir leur rôle de conseil élargi, l’usage de ces outils étant destiné à s’étendre aux donneurs d’ordres, aux asset managers, et aux usagers des bâtiments. Un accompagnement qui était jusqu’alors réservé aux prestataires de services. En outre, il s’agira pour ces éditeurs d’intégrer les outils technologiques du FM - capteurs, solutions de gestion de patrimoine, de gestion technique, et de consommation d’énergie - dans une interface commune, et de faciliter leur utilisation. L’objectif étant de simplifier la production et l’exploitation des données, tout en s’assurant du respect des normes réglementaires en vigueur, et de proposer aux utilisateurs une veille métier. À moyen terme, tout éditeur de plateforme digitale FM devra donc conjuguer pérennité de la solution, sécurité, évolutivité, ouverture aux technologies tierces, expertise métier, et certification des utilisateurs

Bonne lecture à tous !

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